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mardi 4 décembre 2007

Une encyclique de Benoit XVI et les accomodements raisonnables


Avez-vous lu la dernière encyclique de Benoit XVI (« Sauvés par l’espérance »)? Non ? Mais qu’attendez-vous? C’est un texte extraordinaire, à lire à tout prix, spécialement dans le contexte de fronde médiatique actuelle contre l’Église catholique et son message. Dans ce texte exceptionnel, tant du point de vue philosophique que du point de vue spirituel, le pape essaie de nous faire réfléchir sur les raisons de notre espérance chrétienne, et sur les raisons du désespoir des sociétés ayant oublié Dieu.


Dans les débats récents sur les ‘accommodements raisonnables’, on nous a rappelé qu’on ne veut plus se faire dire qu’il y a un ciel, qu’il a des péchés, et que les évêques ne devraient pas nous rappeler qu’on n’est pas des anges. Or on ne supporte plus ce genre d’interventions publiques, sous prétexte que l’Église n’a plus rien à offrir au monde post-chrétien. Ah tiens… intéressant !


Quelques personnes ont néanmoins eu l’honnêteté de dire que ceux qui sont critiqués sont curieusement ceux qui ont donné de la dignité à nos ancêtres en leur montrant à lire, écrire et à découvrir la culture dans les écoles et les collèges. Comment ils ont aussi pris soin des malades, des vieillards et des bébés dont personne ne voulait, et ce à des coûts dérisoires. Ces personnes l’ont peut-être quelque fois mal fait, mais ils ont réussi à soigner, élever, éduquer et émanciper ceux qui leur mordent actuellement la main. Personne ne peut nier cela.


Séparation Église-État obligeant, on demande impoliment à l’Église de ne plus nous parler de nos péchés, parce que ca nous étouffe. Mais en retour quelles sont les nouvelles valeurs de ce Québec épuré de son âme? Une natalité à son plus bas, un horaire d’esclave pour le père et la mère, des familles éclatées, des listes d’attente interminables à l’urgence ou la garderie, une société de plus en plus érotisée, un capitalisme d’affaire sauvage qui ferme les usines et renvoie trop les gens quelques jours avant d’avoir à leur payer l’assurance emploi, des courses à n’en plus finir aux tribunaux ? Un « nous » flou, contesté par chacun de nous, une violence gratuite quotidienne autant aux informations que dans les divertissements, une société politique qui ment comme on ne nous a jamais menti ? En somme, ces alternatives nourrissent-elles notre espérance ? Non bien sûr,


Et c’est d’espérance que le pape nous parle. Espérance surnaturelle, certes, mais aussi d’espérance humaine. Et là-dessus, l’église a beaucoup à offrir.


Sans vouloir même résumer ce texte, on y trouve des idées intéressantes, qui nous situent par rapport à la quête d’espérance. Ainsi, il fait allusion à cette curieuse quête de vivre éternellement, mais aussi au désir d’une qualité de vie si haute qu’elle est portée à éliminer ceux qui vivent mal. « Que voulons-nous ? », demande-t-il .


D'une part, nous ne voulons pas mourir; surtout celui qui nous aime ne veut pas que nous mourions. D'autre part, nous ne désirons même pas cependant continuer à exister de manière illimitée et même la terre n'a pas été créée dans cette perspective. Alors, que voulons-nous vraiment? Ce paradoxe de notre propre attitude suscite une question plus profonde: qu'est-ce en réalité que la « vie »? Et que signifie véritablement « éternité »? Il y a des moments où nous le percevons tout à coup: oui, ce serait précisément cela – la vraie « vie » – ainsi devrait-elle être. Par comparaison, ce que, dans la vie quotidienne, nous appelons « vie », en vérité ne l'est pas. Dans sa longue lettre sur la prière adressée à Proba, une veuve romaine aisée et mère de trois consuls, Augustin écrivit un jour: dans le fond, nous voulons une seule chose – « la vie bienheureuse », la vie qui est simplement vie, simplement « bonheur ».

En sommes, nous aspirons à une vie matérielle heureuse le plus long possible, mais qui est toujours trop longue pour qu’elle puisse vraiment être ‘heureuse’.


On cherche quelque chose qui va au-delà de ce que la vie ici bas ne peut nous offrir. Comment arriver à plus ?


Benoit XVI nous révèle des tentatives de bonheur dans le monde d’ici bas : d’abord, dans une espérance à l’emporte-pièce en la science. Avec quels résultats : l’arbitraire d’une pensée scientifique sans guide, et l’utilisation des puissants pour leurs intérêts contre les autres (la bombe atomique, et la pollution environnementale). Il n’y a pas d’espérance de ce côté, sauf l’espérance de d’améliorations partielles, et la crainte parallèle du mauvais emploi de ces améliorations contre l’homme. Certainement pas de vraie espérance.

Historiquement, d’autres ont mis leur espérance dans la raison « scientifique » : il cite Kant et Marx. Kant réalise vite que ses espérances sont limitées par la liberté humaine, qui finit toujours par gâter la sauce. Marx croit totalement à sons système dialectique. Voici une citation intéressante de l’Encyclique :


Le progrès vers le mieux, vers le monde définitivement bon, ne provient pas simplement de la science, mais de la politique – d'une politique pensée scientifiquement, qui sait reconnaître la structure de l'histoire et de la société, et qui indique ainsi la voie vers la révolution, vers le changement de toutes les choses. Avec précision, même si c'est de manière unilatérale et partiale, Marx a décrit la situation de son temps et il a illustré avec une grande capacité d'analyse les voies qui ouvrent à la révolution – non seulement théoriquement: avec le parti communiste, né du manifeste communiste de 1848, il l'a aussi lancée concrètement. Sa promesse, grâce à la précision des analyses et aux indications claires des instruments pour le changement radical, a fasciné et fascine encore toujours de nouveau. La révolution s'est aussi vérifiée de manière plus radicale en Russie.

Mais avec sa victoire, l'erreur fondamentale de Marx a aussi été rendue évidente. Il a indiqué avec exactitude comment réaliser le renversement. Mais il ne nous a pas dit comment les choses auraient dû se dérouler après. Il supposait simplement que, avec l'expropriation de la classe dominante, avec la chute du pouvoir politique et avec la socialisation des moyens de production, se serait réalisée la Nouvelle Jérusalem: alors, toutes les contradictions auraient en effet été annulées, l'homme et le monde auraient finalement vu clair en eux-mêmes (…) Marx n'a pas seulement manqué de penser les institutions nécessaires pour le nouveau monde – on ne devait en effet plus en avoir besoin. Qu'il ne nous en dise rien, c'est la conséquence logique de sa mise en place. Son erreur est plus en profondeur. Il a oublié que l'homme demeure toujours homme. Il a oublié l'homme et il a oublié sa liberté. Il a oublié que la liberté demeure toujours liberté, même pour le mal. Il croyait que, une fois mise en place l'économie, tout aurait été mis en place. Sa véritable erreur est le matérialisme: en effet, l'homme n'est pas seulement le produit de conditions économiques, et il n'est pas possible de le guérir uniquement de l'extérieur, créant des conditions économiques favorables (20, 21).

Cet extrait montre comment un bonheur pensé logiquement (comme l’exige la méthode scientifique) laisse nécessairement de côté un aspect important de l’espérance : la liberté humaine, qui peut entraver (et qui de fait entrave) la quête de la vraie espérance.


Benoit XVI porte un jugement sur les espérances matérialistes :


Les bonnes structures aident, mais, à elles seules, elles ne suffisent pas. L'homme ne peut jamais être racheté simplement de l'extérieur. Francis Bacon et les adeptes du courant de pensée de l'ère moderne qu'il a inspiré, en considérant que l'homme serait racheté par la science, se trompaient. Par une telle attente, on demande trop à la science; cette sorte d'espérance est fallacieuse. La science peut contribuer beaucoup à l'humanisation du monde et de l'humanité. Cependant, elle peut aussi détruire l'homme et le monde, si elle n'est pas orientée par des forces qui se trouvent hors d'elle.


En somme, aucun bien matériel, aucune structure rationnelle ou politique ne garantit l’espérance. Laissées à elle-même, la liberté humaine dévie vers le péché, et notre propre péché et ceux de tous les hommes nous amèneraient facilement à perdre l’espérance, si ce n’était d’un véritable rachat, qui existe. Il n’est pas théorique, il existe dans la personne de Jésus-Christ, et nous est rendu accessible comme l’ont expérimenté les premiers chrétiens, riches ou pauvres, une sainte comme Sainte Bakhita (n. 3) et la vie éprouvée de Paul Le-Bao-Tinh (mort martyr en 1857) (n. 37). Comme quoi l’espérance chrétienne n’est pas un leurre.

Que-est donc notre espérance ? Benoit pose cette question : « Cependant, nous devons à présent nous demander de manière explicite: la foi chrétienne est-elle aussi pour nous aujourd'hui une espérance qui transforme et soutient notre vie? Est-elle pour nous « performative » – un message qui forme de manière nouvelle la vie elle-même, ou est-elle désormais simplement une « information » que, entre temps, nous avons mise de côté et qui nous semble dépassée par des informations plus récentes? » L’espérance fondée sur la connaissance de l’éternité, d’une vie éternelle, nous ouvre une panorama nouveau pour notre vie, et nous inspire une vie nouvelle. À lire les témoignages de martyrs et des saints, elle est réelle, et dessine les grandes lignes de notre conduite sur la terre.


L’espérance pointe donc vers la rédemption. À cesujet, Benoit XVI dit :


Ce n'est pas la science qui rachète l'homme. L'homme est racheté par l'amour. Cela vaut déjà dans le domaine purement humain. Lorsque quelqu'un, dans sa vie, fait l'expérience d'un grand amour, il s'agit d'un moment de « rédemption » qui donne un sens nouveau à sa vie. Mais, très rapidement, il se rendra compte que l'amour qui lui a été donné ne résout pas, par lui seul, le problème de sa vie. Il s'agit d'un amour qui demeure fragile. Il peut être détruit par la mort. L'être humain a besoin de l'amour inconditionnel. Il a besoin de la certitude qui lui fait dire: « Ni la mort ni la vie, ni les esprits ni les puissances, ni le présent ni l'avenir, ni les astres, ni les cieux, ni les abîmes, ni aucune autre créature, rien ne pourra nous séparer de l'amour de Dieu qui est en Jésus Christ » (Rm 8, 38-39). Si cet amour absolu existe, avec une certitude absolue, alors – et seulement alors – l'homme est « racheté », quel que soit ce qui lui arrive dans un cas particulier. C'est ce que l'on entend lorsque l'on dit: Jésus Christ nous a « rachetés ». Par lui nous sommes devenus certains de Dieu – d'un Dieu qui ne constitue pas une lointaine « cause première » du monde – parce que son Fils unique s'est fait homme et de lui chacun peut dire: « Ma vie aujourd'hui dans la condition humaine, je la vis dans la foi au Fils de Dieu qui m'a aimé et qui s'est livré pour moi » (Ga 2, 20) (n. 20).

À la fin de l’évocation de ces quelques idées tirés de l’Encyclique Fe Salvi , je pose encore une foi à ces messieurs laïciste qui nous demandent de retourner à la sacristie, « Quelle alternative nous offrez-nous donc ? », et fort m’est de constater que les constructions de l’esprit, les nirvanas, et les diktats de l’état ne donneront aucun bonheur et aucune satisfaction. Vous allez peut-être réussir à chasser la religion des écoles (peut-être), mais vous n’avez rien, mais rien qui nous fasse avancer d’un cran. Il y 2000 ans que le christianisme amène des solutions réelles et réalistes, et qui n’excluent personne (au contraire du laïcisme). Les saints (y compris les martyrs canadiens) ont montré que ce qu’ils recherchaient était noble et inspirant. Ils ont vécu d’espérance pour eux-mêmes et pour leur pays, et ont donné cours à de grands courants d’éducation, de spiritualité. De culture, que le nihilisme actuel n’arrive pas à supplanter.

1 commentaire:

Matthieu Fecteau a dit...

Je crois qu'il est important de mentionner qu'aujourd'hui, plus que jamais, il n'y a pas de séparation "d"Église" et d'État ... l'union est plus forte que jamais. Sauf que l'État n'est plus unie à l'Église catholique mais a une autre Église, l'"Église" des humanites séculiers. Vous pouvez vous procurer leurs credos en recherchant "humanist manifesto" sur le web et vous verrez que c'est la religion que nos politiciens font la promotion. Il y a beaucoup d'hypocrisie dans l'air ...

La faille de leur religion est la suivante. Ils disent : "Le seul moyen d'atteindre la vérité est par la science, et non par la Foi, ni la philosophie.". Nous n'avons qu'à leur poser la question : "prouvez-nous par un test scientifique le dogme que vous venez de proclamer !" Ils ne peuvent pas répondre car il est question de "foi" ... et cette "foi" est la religion officielle de l'État à l'école et les professeurs sont obligés d'y adhérer. Tous le système politique tourne autour de cela.