Consultez aussi notre section supplémentaire RÉFLEXIONS+PLUS

Rechercher sur ce blogue

vendredi 12 septembre 2008

Homélie du 14 septembre, La Croix Glorieuse


Les deux croix

Les textes d'aujourd'hui nous ramènent à l'incontournable mystère de la croix, « folie » pour les uns, « scandale » pour les autres.

Encore aujourd'hui, la croix interpelle. Elle irrite celui qui n'en veut pas. Sur la place publique, dans le contexte des prochaines élections canadiennes, on a fini, dans certains milieux, par se définir contre tout ce qui est moral et qui vient limiter certaines politiques amorales. L'ennemi, nous rappelait-on, c'est ce qui s'oppose à la modernité, à toute politique progressive moderne qui définit les nouveaux acquis sociaux: l'avortement, le mariage des personnes de même sexe, la laïcisation de l'enseignement publique, etc. On prétend qui toute personne qui vote contre ce type de « progrès » est buté, étroit, quand ce n'est pas appuyer un agenda caché ou secret ...

On dirait qu'on en est venu à penser que tout ce qui est moderne (nouveau, de gauche, progressif) est un avancement, surtout si cela s'oppose au catholicisme. C'est, reporté aujourd'hui, la situation des juifs dans le désert au temps du serpent d'airain. Ils ne sont plus contents avec ce qu'ils ont reçu de Dieu en réalisations, et en promesses à réaliser: « Pourquoi nous avoir fait monter d'Égypte ? Était-ce pour nous faire mourir dans le désert, où il n'y a ni pain ni eau ? Nous sommes dégoûtés de cette nourriture misérable ! »

Dieu nous comble de dons: et nous trouvons à redire. Ce siècle est caractérisé par une insatisfaction généralisée (on ne lit dans les journaux que drames, frustrations, injustices, vengeances), mais on ne veut pas revenir au bon sens: la loi de Dieu qui est un don aux hommes, dont on ne semble pas vouloir ( une « misérable nourriture »). On préfère souffrir tout seul que de prendre l'aide de Dieu. Évidemment, cette souffrance n'est pas la croix du Christ, car elle écrase et étouffe. C'est la croix de l'orgueil, qui père lourd, et qui mène à l'illusion de la satisfaction, malgré des souffrances intolérables qu'on ne va pas tarder à attribuer à Dieu, si l'occasion se présente.

Pendant ce temps, les chrétiens continuent de prier et de vivre activement la charité, dans des oeuvres sociales d'envergure, dans un travail professionnel fait avec esprit de service, efficace, qui soulage à la fois le corps et l'âme. Bien sûr, cela demande l'esprit de sacrifice, la charité envers tous, l'oubli de soi, beaucoup d'effort pour faire passer les autres avant soi, et la fidélité à la loi de Dieu. C'est la croix des chrétiens pratiquants authentiques. Celle qui commence par mettre Dieu en premier dans sa vie, au service des autres, avec droiture. Cette croix est celle qui guérit et régénère. Cette croix délivre et donne un sens de plénitude à cette vie. L'autre croix, celle de l'orgueil, finit par étouffer, elle cherche des compensations dans le vinaigre (que Jésus a refusé), Elle rend hostile à tout ce qui est étranger au succès personnel, à l'arrivisme, à l'enflure de ses propres vices. Sous cette croix troublante, on se soulage en s'éloignant chaque fois davantage de Dieu, en contemplant, comme Adam et Ève après le péché originel, sa propre nudité. Son manque radical: « Et qui t'a appris que tu étais nu ? » demande Dieu à Adam... Avec moi, dirait-il, tu étais riche, tu avais tout. Maintenant, tu viens de te détacher de la source de ta richesse, et tu considère ce qui te reste (ta « nudité ») avec fierté, alors que tu as mis de côté tout ce que je t'avais offert. N'as tu pas honte ?

Mais détachés de Dieu, la gloire ne peut être qu'en soi-même, et cela même si on agit pour le bien de tous. On ne le ferait pas sans une possibilité de gloriole. Mince compensation pour cette joie et cette paix qu'on reçoit si abondamment avec Dieu.

Comme Adam, qui attribue si stupidement ce qui s'est passé à sa femme, comme si lui-même n'avait pas voulu lui-aussi du fruit prohibé, l'homme moderne attribue toutes les fautes de la modernité aux hommes et femmes de foi, passés, présents et futurs... Et voilà sans doute une des croix les plus difficiles à porter pour un chrétien. Celle qui est injuste et méchante. Cette croix, on voudrait facilement la rejeter, clamer à l'injustice, qu'on a pas le droit. Les problèmes que les hommes et les femmes de foi vivent actuellement au Québec sont injustes, même si pas totalement immérités: les mariages qui ne marchent plus, les avortement à la pelleté, les écoles chrétiennes où on ne peut même pas enseigner sa foi, le risque réel de l'euthanasie, et les cancans injustes contre une église qu'on ne connaît évidement pas. Tout cela fait souffrir beaucoup, surtout que c'est injustifié. Mais Quelqu'un a souffert, il y a deux millénaires, des châtiments qu'il n'avait pas mérité; on s'est moqué de lui en public, on lui a administré une sérieuse correction (40 coups de fouets) avant de le mettre à mort ... sur une croix.

Il l'a fait pour nous montrer que la croix du chrétien a un sens. Elle exprime un amour extraordinaire envers tous les fils d'Adam, pécheurs. Elle nous dit que Jésus, vrai Dieu et vrai homme a pris sur lui notre misère pour nous en libérer. Elle est aussi une invitation à nous comporter comme lui, devant les injustes agresseurs: aimer et pardonner, sans laisser aller les droits de Dieu. Jésus nous a demandé d'aimer nos ennemis, mais il n'a quand-même pas évité les débats et les affrontements pour la vérité. C'est d'ailleurs à cause d'eux qu'il est mort sur la croix...

Ce qui nous amène à considérer comment prendre notre croix: avec amour pour tous, mais sans éviter de se tenir droit pour Dieu, fiers, de ce Père qui est notre Dieu, même si cela risque de nous créer des ennuis personnels. Cela, Saint Paul l'appelait l'appelait signe de contradiction. Ce que nous sommes prêts à devenir, si nous voulons être « sel » et « lumière », par amour pour Dieu notre Père et pour tous nos frères les hommes.

Le Maître passe et repasse à maintes reprises, très près de nous. Il nous regarde... Et si tu le regardes, si tu l'écoutes, si tu ne le repousses pas, Il t'apprendra à donner un sens surnaturel à chacune de tes actions... Et alors, toi aussi, où que tu te trouves, tu sèmeras la consolation, la paix et la joie. (St Josemaria Escriva, Chemin de croix, no 8.4)


----


Aucun commentaire: